Une agriculture plusieurs fois millénaire

Publié le 13 avril 2017 - Mis à jour le 16 novembre 2018

Le travail des hommes construit et modèle le paysage


La lecture scientifique du paysage existe depuis plusieurs décennies, et elle passe notamment par l'analyse archéologique des différents éléments qui composent ce paysage.
Ainsi en Val de Loire des études approfondies ont été menées, notamment entre Suèvres et Beaugency, et les indices d'une histoire plusieurs fois millénaire de l’activité humaine y sont nombreux.
Au nord du chemin de fer depuis Suèvres jusqu’à l’Orléanais, sur les plateaux de la Petite Beauce, l’activité humaine celtique a laissé des traces. Les archéologues ont découvert tout un système qui date d’au moins 2200 ans : des routes qui reliaient de nombreuses fermes - des villae - et les vestiges d'un véritable quadrillage des parcelles agricoles; des parcelles de grande taille et qui n'étaient pas clôturées, alors que, plus tard, les gallo-romains contrairement aux Celtes, ont développé les enclos rectangulaires entourés de haies.
Depuis les années 1950, les chercheurs tentent de comprendre l’origine et le fonctionnement d’un type particulier de délimitations des champs, qui sont bien visibles, même à l’oeil nu. Ce sont des crêtes de labour, ou « ackerberg ». À chaque limite de parcelle, au bout du sillon, la terre s'accumule. Pourquoi ? Deux hypothèses : soit c'est là que le cultivateur a nettoyé sa charrue, ou bien c'est juste le mouvement de l'attelage qui a repoussé la terre à cet endroit. Le résultat, ce sont des talus, surélevés par plusieurs siècles de labours. Ces talus sont devenus des sentiers ... qui permettaient aux agriculteurs d'accéder aux parcelles enclavées sans piétiner les autres cultures.
Ils portent plusieurs noms : « tournières » en Val de Loire ou « têtières » dans la Beauce ; ils peuvent atteindre un mètre de hauteur avec une longueur très variable. Les engins agricoles modernes et le remembrement en grandes parcelles ont détruit beaucoup de ces tournières, mais on en voit encore quelques-unes dans les champs, en particulier à l'aide des prospections thermiques ou par photographies aériennes. Leurs lignes droites perpendiculaires à la voirie marquent le paysage et témoignent de l’usage millénaire de celui-ci, ce sont les derniers indices d'un mode de vie et d'un système de communication jusqu’alors insoupçonnés.


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