Labels patrimoniaux : stop ou encore ?

Les labels du patrimoine culturel et naturel face aux enjeux de développement local et touristique

On assiste depuis quelques décennies à une multiplication des labels dans de nombreux domaines, aussi bien dans l'alimentation (« Label Rouge », « Label AB »), l'environnement (« Label FSC », « Grands site de France ») ou encore l'artisanat (« Villes et métiers d’art », « Entreprise du patrimoine vivant »). Ces labels constituent des outils de certification de la qualité, que ce soit la propreté des eaux de baignade (« Pavillon bleu »), l’accueil des voyageurs (« Accueil vélo »), les paysages nocturnes (« Villes villages étoilés »), ou encore l’intérêt des lieux à visiter (« Jardins remarquables »). En s’appropriant cette logique d’économie de marché dont le label est issu, l’inflation constatée de ces marqueurs laisse entendre qu’il y a toujours, derrière, la promesse, du côté des visiteurs, d’une expérience réussie, et du côté acteurs qui promeuvent ces labels, une hausse de la consommation et de la fréquentation touristiques.

Dans le domaine du patrimoine, ces labels se sont multipliés, en particulier depuis les années 1980, dans un contexte de décentralisation et de contractualisation des politiques culturelles (Tanchoux et Priet, 2020), autant en ce qui concerne le patrimoine culturel que naturel. Ces labels se déclinent désormais à plusieurs échelles : du local (« Villages de caractère du Loiret ») au national (« Villes et pays d’art et d'histoire ») voire à l’échelle européenne (« Label du patrimoine européen ») et mondiale (« Patrimoine mondial de l’UNESCO »). Ce foisonnement – qui concerne donc une diversité d’objets, de thématiques et d’échelles – montre l'appétence des acteurs publics et privés à s’engager dans une dynamique de valorisation patrimoniale.

La littérature scientifique témoigne de l’intérêt des universitaires pour le sujet. Ainsi, du côté des sciences de gestion, ou dans une perspective pluridisciplinaire (Peyrache-Gadeau, Basset et al., 2020), des travaux interrogent par exemple les labels patrimoniaux comme éléments de différenciation territoriale (Agbokanzo, 2019) quand des juristes travaillent sur la distinction « marques/labels » dans la valorisation du territoire et sur les modes d’action des politiques publiques de la culture. Les géographes se sont saisis du sujet en analysant la labellisation patrimoniale comme levier du développement local (Landel et Senil, 2009 ; Prigent, 2013) et outil de transformation urbaine (Houllier-Guibert et Mortelette, 2020). Si la majorité des travaux sur le sujet interrogent donc les effets attendus de la labellisation, certains auteurs questionnent aussi la réception de ces labels (Abrioux et al., 2016), souvent méconnus du grand public et pourtant largement mobilisés par les pouvoirs publics qui y placent des attentes fortes (Fournier, 2015).

Dans ce cadre, le projet LAPTER (Labels patrimoniaux et touristiques en région Centre-Val de Loire : une ressource territoriale ?), réalisé entre 2022 et 2025, s’est plus spécifiquement penché sur la mobilisation de certains labels patrimoniaux dans les politiques de développement local et d'aménagement du territoire. Le projet s'est concentré sur quatre d’entre eux, qui concernaient plutôt le patrimoine historique, culturel et architectural (« Plus Beaux Villages de France », « Plus Beaux Détours de France », « Petites Cités de Caractère » et « Villes et Pays d'Art et d'Histoire ») à l’échelle de la région Centre-Val de Loire tout en considérant les dynamiques des réseaux nationaux.

À l’occasion de la fin du programme de recherche LAPTER, le colloque « Labels patrimoniaux : stop ou encore ? » propose d’approfondir les réflexions évoquées ci-dessus sur les labels patrimoniaux (entendus ici au sens du patrimoine culturel et naturel).